Par Jacques Labat.
Dans ses dernières analyses sur les chiffres 20141, l’AFG2 recense le nombre de sociétés de gestion exerçant une activité en France : près de 630 établissements1 gèrent 3 200 milliards d’euros d’actifs1 avec des niveaux d’AUM3 très disparates d’un établissement à l’autre. Une cinquantaine d’établissements atteint le milliard d’euros avec une dizaine qui gère ou dépasse les 100 milliards d’euros.
Selon les cas, filiales de groupes bancaires ou de compagnies d’assurance, sociétés indépendantes et / ou entrepreneuriales, acteurs historiques ou nouveaux entrants4, des établissements gérant des millions d’euros côtoient des établissements dont les AUM peuvent atteindre, pour le leader français, jusqu’à 952 milliards d’euros5.
Malgré la diversité de ces acteurs, une constante demeure, celle des enjeux partagés à relever :
- Concevoir les meilleurs produits, calés sur les besoins des clients, dans le meilleur des délais
- Rechercher la performance et maîtriser les risques
- Communiquer, promouvoir et commercialiser les produits
- Etre en conformité avec un corpus réglementaire qui s’étoffe et se complexifie au fil des années
- Penser et déployer la gouvernance de la société de gestion sur les activités core-business et les autres métiers de la société de gestion.
Dans ces conditions, comment, pour des acteurs aux tailles si disparates, est-il possible de garantir des réalisations de qualité, en ligne avec les objectifs business de la société de gestion, conformes aux contraintes réglementaires et dans des enveloppes budgétaires optimisées ?
Les acteurs majeurs disposent des moyens nécessaires pour gérer en interne ces différentes missions ou pour faire le choix d’en externaliser certaines, auprès de prestataires filiales du Groupe dont ils dépendent ou auprès de tiers externes.
L’objectif le plus souvent visé consiste à concentrer les ressources de la société de gestion sur les fonctions à forte valeur ajoutée et qu’elle estime être le cœur de son métier. Les fonctions d’administration des fonds, de middle-office, de négociation, de reporting sont ainsi les plus fréquemment déléguées et ce, d’autant plus facilement, que des passerelles naturelles existent au sein des grands groupes bancaires entre sociétés de gestion et investor services, ces derniers ayant élaboré des prestations de services dédiées. Ce que paient les premières rétribue les seconds avec, au final, des revenus qui restent, dans tous les cas, internes au Groupe.
Pour les sociétés de gestion de taille plus réduite, bien souvent entrepreneuriales, et les nouveaux entrants, cette problématique de savoir et de pouvoir tout concilier est encore plus aiguë. Le plus souvent, la réussite de ces sociétés repose avant tout sur l’excellence de la gestion (positionnement de niche, track record des équipes, performance du fonds, robustesse du process de gestion, …) et sur la capacité à commercialiser des fonds. Ces deux axes concentrent ainsi naturellement toutes les énergies et les ressources de la société de gestion.
Dans cette optique, l’externalisation des fonctions non core business répond alors à plusieurs logiques :
- Coverage : concentrer les ressources sur les réelles sources de valeur ajoutée et sur l’expertise naturelle des équipes et déléguer les fonctions non couvertes
- Efficacité et réduction du risque opérationnel : viser l’expertise dans tous les domaines en sélectionnant des spécialistes pour chaque fonction
- Excellence : capitaliser sur les best practice et les bénéfices des veilles réglementaire et technologique assurées en permanence par les experts métiers auprès desquels la société de gestion fait le choix de confier certaines fonctions déléguées
- Coût : bannir les coûts fixes associés au maintien en interne d’équipes et d’infrastructures techniques dédiées et privilégier des structures de frais variables, calés sur le volume d’activité de la société de gestion
L’avis d’André MAYENS, Dirigeant-Fondateur de BeeAM qui propose des solutions d’assistance à l’externalisation métier
Quelles sont les attentes des sociétés de gestion entrepreneuriales et des nouveaux entrants en matière d’externalisation ?
Les nouvelles sociétés de gestion ont, pour la plupart, bien compris l’intérêt du recours à l’externalisation. Elle leur permet de se concentrer sur la génération de performance, source principale de pérennité dans le temps.
Historiquement, les services les plus souvent externalisés sont la valorisation, le contrôle réglementaire et la comptabilité générale. Ils sont réalisés par des sociétés ayant « pignon sur rue », d’un grand professionnalisme, avec des services comparables, mais pas forcément avec les mêmes forces ni les mêmes faiblesses.
De plus en plus, et sous l’impulsion de l’arrivée de nouveaux acteurs notamment, les fonctions de négociation, le middle-office, l’informatique, le marketing, les risques de marché6, la commercialisation7 peuvent être sous-traitées. Ces services sont très souvent proposés par des professionnels de la Finance, ayant décidé de capitaliser sur leur expertise pour créer leur propre entreprise, ou par les filiales de grands groupes avec, dans les deux cas, les bénéfices pour leurs clients respectifs d’une solide expérience « métier ».
Il convient de penser cette externalisation comme un véritable investissement dans le temps, capable d’anticiper la croissance et d’éviter les sauts importants dans les déploiements. Les jeunes entreprises de la gestion d’actifs ont, en effet, tendance à ne pas prévoir leurs investissements d’une année sur l’autre, pourtant nécessaires à une bonne gestion de la croissance. Cette externalisation permet de bâtir leur business plan à partir d’une structure de coûts fixes « allégée », tout en bénéficiant à la fois de la connaissance d’acteurs de premier plan et de professionnels rodés aux autres métiers que celui de « créateur d’Alpha ».
C’est donc sous la forme d’un véritable partenariat, et non pas uniquement comme une nième offre de services,que doit être analysé et choisi le fournisseur, en s’attachant principalement à la prise en compte de l’évolution souhaitée de la société de gestion.
Les sociétés de gestion ont ainsi un vrai besoin de « fournisseurs-partenaires », capables de les aider à concentrer leurs forces sur la création de valeur et de les sécuriser notamment sur les aspects « réglementaire » et « reporting », de plus en plus prégnants et émanant des autorités de tutelle ou de leurs propres clients.
C’est dans ces relations « clients / fournisseurs-partenaires » que la société de gestion peut se faire accompagner par BeeAM tant dans ses choix que dans l’implémentation. La difficulté, pour la société de gestion, est de choisir le fournisseur non seulement expert sur son domaine mais aussi susceptible d’échanger efficacement avec les prestataires des autres services externalisés (et qui sont parfois les concurrents du prestataire retenu). C’est souvent le degré de technicité élevé du sujet ou parfois une moindre méconnaissance de la problématique client, qui transforment et amplifient la complexité et le coût de la solution proposée par le fournisseur. Et ce dernier est bien sûr mal placé pour arbitrer et conseiller lui-même la solution la plus économique et efficace pour la société de gestion.
C’est dans l’expression des « vrais » besoins pour l’un et la capacité à proposer une offre « ciblée et ouverte » pour l’autre, que BeeAM intervient afin d’aider la société de gestion à effectuer l’arbitrage « efficacité / coût ».
L’objectif visé est ainsi de veiller à ce que ces « fournisseurs-partenaires » soient suffisamment dimensionnés pour garantir des prestations calibrées et de qualité à l’ensemble de leurs clients et de s’assurer également de leur volonté de collaborer ensemble, afin de limiter les coûts cachés d’intégration (rupture de chaine, redondance, interface manuelle…) et de créer un process le plus compact possible (et donc le plus économique !).
De quel apport de valeur les solutions de gestion bénéficient-elles en déléguant une partie de leurs activités ?
La délégation des activités de valorisation, de middle-office, de reporting, … permet de bénéficier du savoir-faire de véritables professionnels, et de capitaliser sur les «best practices ». Depuis longtemps, l’homme a compris l’utilité de se regrouper pour faire « mieux » ensemble.
Il en va de même pour les « petites et moyennes » sociétés de gestion, même si celles-ci ont du mal à partager, la déclinaison opérationnelle de l’adage « l’union fait la force » a beaucoup d’avantages. Il suffit, pour illustrer ce propos, de regarder le modèle allemand, ou encore l’évolution outre-Atlantique des acteurs de la gestion d’actifs vers des modèles « multi-boutiques » : plusieurs établissements deviennent partenaires pour gagner en taille critique et en efficacité.
De plus, ce type d’« union » ne saurait se résumer à une simple renégociation de coût. Si la société de gestion fait un effort de standardisation et de rationalisation, le fournisseur agit en véritable partenaire et toute la chaine de valeur s’en trouve améliorée. Pour la société de gestion, il s’agit de choisir « le plus évolutif », voire « la chaine la plus intégrée », ce qui se traduit in fine par le meilleur rapport qualité/prix.
De la même façon, cette mutualisation permet le partage des coûts de mise à niveau technologique, une veille règlementaire de premier plan, et plus généralement des retours d’expériences croisés.
L’appartenance à une«famille», une «communauté», utilisant les mêmes fournisseurs- partenaires, et capitalisant ainsi sur les « best-practices », est un atout important pour se faire connaitre et reconnaitre par des investisseurs institutionnels. En effet, si ces derniers sont équipés en mesure de risques « marchés » de leurs investissements, il en est tout autre pour le risque « société ». En choisissant de confier la gestion d’une part de leurs actifs à une société de gestion entrepreneuriale et / ou de niche, l’investisseur institutionnel s’expose au risque éventuel que cette dernière, focalisée sur son expertise de gestion, ne soit pas conforme « nativement » à son cahier des charges et aux exigences visées dans ses travaux de due diligence des gestionnaires externes.
La collaboration de la société de gestion avec des partenaires spécialistes permet de lever ce doute et de proposer aux investisseurs institutionnels un dispositif complet (gestion des investissements, fonctions supports, valorisation, …) robuste et répondant aux standards de qualité du marché.
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Parallèlement à la mise en place de délégation de fonctions, l’externalisation peut prendre également la forme d’achats de prestations externes afin d’assister et de renforcer les équipes métiers en place : assistance juridique pour la mise en place des contrats avec les contreparties, veille réglementaire et législative multi-pays pour préparer un déploiement à l’international, appel à des consultants pour mener à bien des travaux d’organisation ou de pilotage de projets, d’optimisation de dispositifs, de choix d’outils, … Sur la partie technique, le recours à des intervenants externes est bien souvent devenu la norme avec, de plus en plus, un exercice poussé jusqu’au bout via la mise en place de centres de services.
Les dispositifs ainsi déployés permettent à la société de gestion de capitaliser sur des équipes bâties, animées et administrées par un prestataire qui propose au client final des livrables « clés en main ». L’optique retenue dans ce type de cas de figure est de passer d’une
relation « un client / n fournisseurs » à une relation de partenariat industriel entre un client qui s’appuie sur un pool de compétences (techniques mais aussi métiers) piloté par un partenaire unique qui s’engage sur un niveau de service.
La décision d’externaliser est dans bien des cas un choix de bon sens : la société de gestion déploie ses ressources sur ses expertises natives et stratégiques et elle complète son dispositif en faisant appel à des compétences externes pour sécuriser son activité. L’attention accordée au choix de véritables partenaires industriels qui deviennent bien plus que des prestataires « classiques », et la vigilance déployée dans le contrôle des activités déléguées à des tiers constituent les clés du succès de la mise en place d’une délégation réussie.
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1 Chiffres AFG. Source : « Compilation des chiffres clés 2014 de la gestion d’actifs pour le compte de tiers », publiée le 26 janvier 2016
2 AFG : Association Française de Gestion financière – http://www.afg.asso.fr/
3 AUM : Asset Under Management (actifs sous gestion)
4 Parmi les 630 sociétés de gestion recensées par l’AFG, près de 200 établissements ont moins de 5 ans d’existence, avec un nombre de créations brutes de 48 pour la seule année 2014
5 AUM d’AMUNDI, en date du mois de septembre 2015, Cf. www.amundi.com
6 C’est déjà le cas au Royaume Uni, avec des sociétés comme IRML partenaire du groupe Conventum au Luxembourg.
Pour ce qui est de la France, l’instruction AMF 2012-01 « Organisation de l’activité de gestion d’OPCVM ou d’OPCI et du service d’investissement de gestion de portefeuille pour le compte de tiers en matière de gestion des risques» définit les modalités de recours à un tiers pour l’exercice d’activités de gestion des risques (Cf. Article 4).
7 L’explosion des TPM (Third Party Marketer) aux USA date des années 2000, et leur arrivée en Europe de 2006. Cf. « Des différences notables entre les TPM américains et européens », Option Finance – déc. 2013