Par Jérome Coirier, fondateur de BeeAM.
Toute société de gestion de portefeuille (SGP) doit s’organiser autour de 3 axes majeurs que sont la gestion, bien sûr, la distribution et enfin l’administration. L’ensemble de ces piliers sont sous différentes pressions : concentration du secteur, technicité grandissante des fonctions, autorités de supervision et de régulation. À titre d’exemple, au début des années 90, pratiquement chaque société de gestion avait son propre centre de calcul de valeur liquidative. Aujourd’hui, par la nécessité de professionnalisation d’un certain nombre de métiers, rares sont les SGP ayant conservé cette activité, de plus en plus sous-traitée.
LA GESTION : C’est le «cœur» de la société, la SGP doit délivrer « la meilleure performance possible », tout en restant innovante (une grande partie de la collecte s’effectue sur de nouveaux produits). Mise à part la délégation de gestion à un gérant tiers, français ou étranger (fund hosting ou partenariat de gestion), il existe une certaine forme de sous-traitance de cette fonction comme par exemple l’ana- lyse (fournie par broker, réalisée par un co- mité extérieur ou des sociétés de conseil) ou encore pour ce qui touche à l’exécution de l’ordre (table et/ou middle office externalisé).
LA DISTRIBUTION : Au-delà de faire du « bon pain », il faut savoir le vendre et pour cela s’équiper des fonctions d’animation et de support indispensables. La seule performance ne suffit pas à la réussite d’un produit, même s’il est indéniable qu’elle est nécessaire et qu’elle y contribue fortement. La société de gestion doit se considérer comme une entreprise à part entière, elle se doit d’être à l’écoute des clients afin de proposer un produit et un service qui répondent à leurs attentes et non une « énième » promesse de performance. L’international, voie empruntée par un grand nombre de sociétés, doit passer par une étude préalable de la législation applicable et des impacts règlementaires pour le client. Le développement actuel des TPM (third party marketer), ainsi que des plateformes est une solution « externe » qui doit s’appréhender comme un engagement sur le long terme.
L’ADMINISTRATION : C’est, en général, et à tort nous semble-t-il, le « parent pauvre », et qui fait le plus appel à l’externalisation. Il recouvre notamment les fonctions de système d’information, de back-office, de gestion des bases de données, de contrôle, de finance et comptabilité générale, et de RH. Les solutions d’externalisation sont nombreuses et très souvent utilisées. Tout ceci passe par la mise en œuvre d’une organisation qui fait appel à la fois à de l’anticipation et des investissements (à rapprocher de la dé- marche industrielle en général) pour adapter et mettre à niveau la structure. Le franchis- sement de seuil d’encours (avec un impact sur l’organisation) ne doit plus être considéré comme étant une étape mais comme une évolution logique et naturelle de la courbe de vie de la société.
ACCÉLÉRATION DES CONTRAINTES : Au-delà de la nécessité de décider «quoi, à qui et comment» externaliser un certain nombre des fonctions, la société de gestion doit faire face à une baisse des marges (concurrence, gestions passives ), une accélération des contraintes règlementaires européennes et internationales, et un environnement technologique qui, bien que n’ayant pas encore produit ses effets, sera certainement rapide et disruptif (apparition des robots-advisors, de la « googleisation » de la gestion).
CONCLUSION
Les SGP cherchent aujourd’hui à se concentrer sur leur cœur de métier et s’entourent de prestataires spécialisés œuvrant déjà pour d’autres SGP de toutes tailles. Dans cet environnement en pleine mutation, les investisseurs institutionnels doivent pouvoir conserver un large choix de nouvelles solutions d’investissement. Ils savent parfaitement mesurer et appréhender le risque marchés et doivent pouvoir disposer de plus en plus de mesures « sociétales ». Ces indicateurs les éclairent sur le risque opérationnel des gérants à qui ils confient leur gestion en leur fournissant des informations observables et actualisées, par exemple sur les grands équilibres de la gouvernance et la stabilité de l’entreprise sur le long terme.